La peau, quel organe fabuleux ! On estime que chaque centimètre carré de peau contient 70cm de vaisseaux sanguins, 55cm de neurofibres, 100 glandes sudoripares, 15 glandes sébacées et 230 récepteurs sensoriels. Bien plus qu’une simple couverture de surface, elle nous protège des attaques de notre environnement, régule notre température corporelle, produit les précurseurs de la vitamine D, nous permet d’éliminer certains déchets et de ressentir la douleur d’une brûlure ou la douce caresse d’un être cher. Notre épiderme qui est la partie superficielle de notre peau se renouvelle entièrement tous les 25 à 40 jours.
Notre peau nous préoccupe surtout quand elle fait des siennes. Sécheresse, acné, peau grasse, eczéma, psoriasis, rides, démangeaisons, pigmentation, comédons et autres réjouissances peuvent nous amener à investir dans une ribambelle de produits cosmétiques au prix souvent rédhibitoire. Les crèmes, sérums, masques et peelings agissent sur notre enveloppe de l’extérieur. Or la santé de notre peau est en lien direct avec notre état général de santé et plus précisément avec la santé de nos membranes cellulaires. Celles-ci sont constituées principalement de lipides (corps gras) dont la qualité impacte les échanges entre le milieu extérieur et le milieu intérieur de la cellule et par conséquent la santé de chaque cellule. On peut donc mettre en lien direct la qualité des lipides de notre assiette avec la santé de nos cellules. Je vous invite à zoomer sur cette thématique et, pourquoi pas, à faire le choix aujourd’hui de prendre soin de votre peau de l’intérieur, pour un résultat qui se voit de l’extérieur.
Dans l’assiette
L’assiette qui soutient la santé et par extension la beauté de notre peau est une assiette alcaline[1], de tendance végétarienne, riche en végétaux et en huiles polyinsaturées. De plus, on gagne à privilégier les céréales complètes, à préférer le poisson à la viande (et les œufs au poisson) et on évite les produits laitiers ainsi que les aliments transformés par l’industrie alimentaire (chargés en graisses trans, en sucres raffinés ainsi qu’en additifs de toutes sortes).
De manière générale, on rend service à notre peau avec une alimentation équilibrée au niveau des acides gras. Les acides gras sont les principales molécules qui constituent les corps gras, ceux qu’on nomme les lipides en nutrition. Ils remplissent des fonctions énergétiques mais aussi structurales (les fameuses membranes de nos cellules) et fonctionnelles. Même si l’apport en acides gras essentiels est soigné, leur métabolisme peut encore être entravé par le déficit de certaines coenzymes[2] nécessaires à leur transformation telles que le fer, le zinc, le magnésium, la vitamine B6. Un excès de stress oxydatif peut également leur nuire. Par conséquent nos actions se porteront sur un apport suffisant d’acides gras polyinsaturés, de micronutriments et d’antioxydants.
Omégaquoi ?
Peut-être avez-vous déjà entendu parler des omégas. Ce sont des acides gras qu’on classe en deux familles qui font référence à leur structure chimique. Il s’agit des monoinsaturés (oméga7 et oméga9) et des polyinsaturés (oméga3, oméga5 et omég6). Ils sont dits essentiels car impossibles à fabriquer par notre corps ; il est donc indispensable d’en trouver dans notre assiette.
Nous trouvons les différents omégas dans le monde végétal. Nous les consommons puis les transformons afin de pouvoir les rendre utilisables par nos cellules. Notre compréhension actuelle des besoins en acides gras tient compte des problématiques de transformation métabolique des omégas et du délicat équilibre à trouver entre leurs différents apports. Le ratio conseillé entre oméga3 et oméga6 est de 1:5. Or notre assiette actuelle manque chroniquement d’oméga3 et le ratio oméga3/oméga6 tend plutôt vers du 1:30 voire 40. Plutôt que d’entrer dans des calculs compliqués, je vous invite simplement à faire le choix d’ajouter plus d’oméga3 au quotidien dans votre assiette.
On trouve les oméga3 dans les huiles végétales de colza, de lin, de noix ou de cameline. On les achète de qualité « pressée à froid », on les conserve au frigo et on les consomme en assaisonnement sur nos plats, hors cuisson. On s’offre deux à trois belles cuillères à soupe d’une huile riche en polyinsaturés chaque jour durant les repas de son choix. On peut aussi se fournir en oméga3 déjà transformés[3] par les petits poissons gras tels que les sardines, les maquereaux, les anchois, les truites de Neirivue ou encore par les algues.
Les oméga3 peuvent souffrir de la présence importante de radicaux libres et s’oxyder auquel cas elles ne nous seront d’aucune utilité et même plutôt défavorables. On peut couvrir l’oxydation des huiles par la grande famille de la vitamine E. Celle-ci se trouve notamment dans l’huile de germe de blé[4] . On consomme au quotidien deux à trois cuillères à café d’huile de germe de blé en accompagnement de nos huiles riches en polyinsaturés et on les protége ainsi de l’oxydation.
Micronutrition
Autre acteur essentiel de la santé de notre peau : le zinc. Il entre en effet dans les réactions de synthèse de la kératine[5] et du collagène[6], il accélère la mitose[7] des cellules souches des kératinocytes[8] dans la couche basale de l’épiderme, il accélère la cicatrisation (plaies, chirurgie, escarres, brûlures, etc.) et cerise sur le gâteau, il a un effet anti-acné. Le zinc lutte également contre les effets délétères des éléments-traces métalliques (appellation moderne des métaux lourds) sur nos enzymes. En veillant à amener suffisamment de zinc dans son assiette avec des aliments comme les céréales complètes (germe de blé - champion du monde), les œufs, les noix et graines (sésame, pavot) et une bonne douzaine d’huîtres aussi souvent que possible lors de nos passages en bord d’océan… ou plus simple, chez le poissonnier du coin, on fournit aux cellules de notre peau les éléments dont elles ont besoin pour vivre et se renouveler[9]. Que celles et ceux qui n’aiment pas les huîtres se rassurent, on trouve également le zinc dans différents crustacés et fruits de mer comme le crabe, la langouste, la moule, le calamar ou encore les algues.
D’autres micronutriments sont essentiels à la bonne santé de notre peau. Il s’agit notamment de la vitamine A[10] et des caroténoïdes, de la vitamine B5, B8 et D3, du soufre et du magnésium. Une assiette variée et colorée, riche en végétaux, crue ou cuisinée à la vapeur douce, nous donne la chance d’en profiter au maximum.
Mais encore…
C’est durant la nuit que notre peau travaille à se régénérer, lorsqu’elle est au calme, loin des agressions extérieures telles que la pollution, le vent et les rayons UV. S’offrir suffisamment d’heures de sommeil est un geste d’amour pour notre peau. Roger Federer disait dormir entre 11 et 12 heures par nuit afin de permettre à son corps de récupérer. Pourquoi ne pas se faire ce cadeau, au moins de temps en temps ? D’autres facteurs dont on gagne à tenir compte sont l’hydratation et la gestion du stress avec par exemple de la méditation, des exercices de respiration ou une sortie quotidienne en extérieur.
Je vous souhaite une belle santé.
Bien à vous,
Joëlle
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[1] Qui a des propriétés alcalinisantes, basifiantes pour l’organisme par opposition à une assiette acidifiante. Pour faire simple : les fruits et les légumes sont basifiants ; les produits animaux, les céréales, les produits laitiers et les aliments transformés sont acidifiants. Cela
n’a pas à voir avec le goût des aliments ; typiquement un citron qui a un goût acide est basifiant pour notre organisme. [2] Une coenzyme est une molécule organique permettant à des enzymes de catalyser une réaction : une coenzyme est un cofacteur d'enzyme. Elle participe obligatoirement à la réaction catabolique ce qui veut dire que sans elle la réaction n’a pas lieu. [3] EPA (acide eicosapentaénoïque) et DHA (acide docosahexaénoïque) sont la forme animale et prête à l’emploi résultant de la transformation en différentes étapes des oméga3. [4] Aucun souci pour les coeliaques ou intolérants au gluten. En effet le gluten est une protéine et l’huile de germe de blé ne contient que des lipides. [5] Substance protéique présente dans les productions épidermiques de l'homme et des animaux (cheveux, ongles, cornes, laine…). [6] Protéine structurale présente dans le tissu conjonctif. Chez l’homme le collagène se trouve notamment dans les os, le cartilage, les muscles et les parois des vaisseaux. Il a pour fonction de conférer aux tissus une résistance mécanique à l’étirement. [7] Division de la cellule au cours de laquelle chaque chromosome se dédouble. [8] Cellules qui constituent 85% de la couche superficielle de la peau, des ongles et des cheveux. [9] La viande rouge et les abats sont une excellente source de zinc également mais ils ne sont pas à privilégier dans ce contexte. [10] La vitamine A est toxique en excès. On peut privilégier l’apport de caroténoïdes qui sont des précurseurs de la vitamine A et qui sont eux totalement sécures et sans effet secondaires. Vive le jus de carotte !
Sources
*Balić Anamaria, Vlašić Domagoj and al., Omega-3 versus omega-6 polyunsaturated fatty acids in the prevention and treatment of inflammatory skin diseases, Int J Mol Sci. 2020 Jan 23;21(3):741
*Dong K., Goyarts E.C. and al., Blue light disrupts the circadian rhythm and create damage in skin cells, Int J Cosmet Sci. 2019 Dec;41(6):558-562
*Fux Manuel, Nutrition spécifique peau, Nutripathologie/peau/acné-eczéma, Formation en nutrition 2021-2022
*Lin Pei-Hui, Sermersheim Matthew and al., Zinc in wound healing modulation, Nutrients. 2017 Dec 24;10(1):16
*Marieb Elaine N., Anatomie et physiologie humaines, DeBoeck Université, 1999
*Melnik Bodo C , Linking diet to acne metabolomics, inflammation and comedogenesis: an update, Clin Cosmet Investig Dermatol. 2015 Jul 15;8:371-88
*Ogawa Youichi, Kinoshita Manao and al., Zinc and skin disorders, Nutrients. 2018 Feb 11;10(2):199
*Simard Mélissa, Rioux Geneviève and al., Investigation of omega-3 polyunsaturated fatty acid biological activity in a tissue-engineered skin model involving psioriatic cells, J Invest Dermatol. 2021 Oct;141(10):2391-2401.e13
*Simopoulos A P, The importance of the ratio of omega-6/omega-3 essential fatty acids, Biomed Pharmacother. 2002 Oct;56(8):365-79
*VanBuren Christine A, Everts Helen B, Vitamin A in skin and hair: an update, Nutrients. 2022 Jul 19;14(14):2952
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